80 logements PLA
OBS-59
Cette opération de 80 logements sociaux menée par l’architecte Vincen Cornu s’inscrit dans le vaste projet de rénovation du centre ville de Montreuil. Situé aux portes de Paris, l’ancien village avait bâti sa prospérité à partir du XVIIe siècle sur la culture des pêches en espalier dont les murs formaient des clos longs et étroits. L’industrialisation et l’urbanisation rapides à partir du milieu du XIXe siècle ont du composer avec cette morphologie des sols aussi particulière que contraignante. Une première opération de rénovation urbaine du centre ville dans les années 1960-70, a tenté de faire table rase de cet héritage en implantant un urbanisme de dalle. Ce territoire, déconnecté du reste de la commune portait donc les traces des différentes logiques urbaines qui s’y étaient superposées et de ce fait des programmes architecturaux très différents. Les failles de cette intervention brutale ont exigé une nouvelle rénovation du « coeur de ville », dont les études ont démarré dès 1991 sous la direction de l’architecte portugais Alvaro Siza, entouré de Laurent et Emmanuelle Baudoin, Christian Devillers et du paysagiste Michel Corajoud. Avec comme fil directeur le souhait de renouer les liens entre les différents quartiers et de créer un tissu urbain en osmose avec la trame viaire et le parcellaire anciens, le programme comprenait la densification du site par la construction de logements, de commerces, d’un théâtre (D. Coulon), d’espaces verts et la réhabilitation des tours de bureaux. Face à la vaste esplanade qui s’étend devant la mairie (remplaçant la dalle) et sur les premières pentes des coteaux était créé la ZAC Franklin-Walwein. Le schéma directeur appliquait le principe de l’îlot ouvert tout en s’inspirant de l’ancien parcellaire. Ainsi, il programmait des immeubles hauts, de logements et de bureaux, dont l’implantation perpendiculaire à la place et autour de grandes cours plantées, permettait l’ensoleillement des immeubles et des vues vers les coteaux. Le retour à l’alignement était réservé à la rue Walwein. C’est le long de cette artère que s’étend le terrain occupé par l’opération de Vincen Cornu, à l’arrière de la ZAC, sur les pentes. L’architecte a du se plier au tracé directeur d’Alvaro Siza qui déterminait les gabarits des bâtiments et leur disposition, et en donner son interprétation. L’ensemble comporte deux bâtiments de tailles différentes, désaxés l’un par rapport à l’autre et par rapport à la rue et séparés par une grande cour. Le plus petit (B), le long de la rue, s’aligne sur un immeuble à R+9 rescapé des années 1950, et implanté en retrait et en biais, selon une ancienne parcelle. La grande barre (A), occupe le coeur d’îlot tout en restant bien visible depuis ses franges. Cette disposition a induit une multiplication de points de vues intéressantes d’autant plus qu’elle offre une réelle visibilité de trois des pignons qui ont reçu un traitement très soigné. Des décalages de hauteurs, R+6 à R+8 pour le A et R+6 à R+9 pour le B, apportent un rythme supplémentaire. L’intérieur de l’îlot est piéton, le parking est enterré, la grande cour est plantée et les logements en rez-de-chaussée disposent de jardinets. Cependant, l’opération est ceinte d’un mur de la hauteur d’un étage, qui occulte pour le passant ces trouées vertes, de même qu’une rue qui devait traverser toute la ZAC a finalement été fermée. Autant de reculs imposés au projet de Siza, pour des raisons de sécurité. Ce mur est peint en rouge brique, comme tous ceux qui entourent les différentes opérations de la ZAC, de façon à former un long ruban unificateur. Pour tirer le meilleur parti des masses imposées par le tracé directeur, Vincen Cornu a choisi de les travailler de l’intérieur. L’épaisseur des barres, 15 mètres pour la plus grande, et leur orientation, approximativement nord-sud, ont induit un système d’emboîtement de duplex inversés, ascendants ou descendants, la plupart traversants. Cette disposition a permis d’orienter tous les séjours au sud et de renvoyer les espaces servants au nord. D’une façon générale, l’architecte s’est appliqué à dessiner des logements dans lesquels la séparation des espaces jours et nuit est très nette. Il a également recherché un maximum d’ouverture des espaces. Grâce au soutien des maîtres d’ouvrages, il a pu offrir des surfaces un peu plus grandes et des volumes plus hauts, jusqu’à 2,90 m, que les normes habituelles. Les cuisines ouvertes sur les séjours, les escaliers des duplex ouverts, les entrées très compactes et sans sas, offrent une meilleure spatialité. Enfin, de nombreux logements bénéficient de généreux balcons, 1,80 x 3,60 m, dont les gardes corps opaques permettent une réelle appropriation par les habitants. Les grands appartements sont nombreux, 22 T3, 29 T4 et 15 T5. La configuration des duplex renversés et la présence de simplex ont permis d’éviter l’effet d’empilement en façades. Ces dernières résultent donc de l’organisation intérieure. La forme suit la fonction. Ce credo moderniste n’étonne pas au vu des volumes épurés, de l’ordonnancement géométrique des façades et de l’enduit blanc relevé de taches de couleur, soulignant le jeu des ouvertures et des retraits (coursives). Cette source d’inspiration ne va pas jusqu’au pastiche et ne sert que pour mettre en scène avec un minimum de moyens mais pour un maximum d’effets des bâtiments à l’identité très forte. Vincen Cornu est aussi scénographe et il a su faire exister ses bâtiments dans un quartier assez dense, en pleine reconstruction, où des projets de qualité ont été livrés récemment . Les façades nord, sur la rue, sont « servantes » : elles abritent dessertes, salles d’eau et chambres. Les coursives forment un rythme horizontal relayé par les bandes de béton grises. Elles sont percées de deux types d’ouvertures, verticales et horizontales, soulignées de quelques carrés de couleur sur les trumeaux. Les façades sud, très ouvertes sont animées par les balcons séparés ou filants. Les pignons forment des avancées sculpturales sur l’espace public. Ils offrent une grande lisibilité des distributions intérieures et fonctionnent comme des signaux à la fois sur le bien habité et sur leur présence urbaine. L’opération a obtenu une mention spéciale lors de l’attribution de l’Equerre d’argent 2004 par le Moniteur.
80 logements PLA. 2 bâtiments, 23 et 57 logements, du T2 au T5, simplex et duplex.
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