Académie Fratellini
OBS-19
Installée à la Plaine-Saint-Denis, l’Académie Fratellini est la première école de cirque construite en dur offrant un cadre institutionnel à l’enseignement des arts du cirque. Pour faire face à la désindustrialisation de ce territoire, un partenariat intercommunal regroupé autour de la ville de Saint-Denis se forme dès 1985, et s’élargit progressivement pour constituer la communauté d’agglomération Plaine Commune. Sous l’impulsion de ce nouvel acteur, un projet urbain est élaboré sur La Plaine afin de redynamiser la zone. Mais c’est l’arrivée du stade de France qui apportera les moyens d’en réaliser les grandes orientations, comme la couverture de l’A1, l’aménagement de l’avenue Wilson et la création des gares RER B et D. Souhaitant diversifier ce territoire où nombreuses entreprises et bureaux sont implantées, la ville de Saint-Denis a fait le choix de programmer dès l’origine un équipement culturel en réservant une parcelle utilisée comme parking le temps de la coupe du monde de football en 1998. L’Académie Fratellini, après 20 années d’installation provisoire à la porte de la Villette, s’est vue attribuer un site propre. Le terrain dévolu offre le double avantage d’être facilement accessible en transports en commun et d’être bien desservi par le réseau routier. Inaugurée en 2003, l’Académie Fratellini se présente aujourd’hui comme un bâtiment à l’architecture innovante.La parcelle réservée n’étant au départ que provisoire, l’ensemble du projet impliquait un principe de constructions démontables, conservant de ce fait un des caractères fondamentaux de l’architecture circassienne. Cette contrainte s’articulait avec le choix des maîtres d’oeuvre, Patrick Bouchain et Loïc Julienne de porter un projet respectueux de l’environnement et à faible budget. Le bois, matériau recyclable et durable par excellence est majoritairement utilisé pour la réalisation des différents bâtiments, qui reprennent le système constructif simplifié du hangar : charpente bois recouverte de parement en tôle. On retrouve ainsi 10 types de charpentes, qui vont de la plus modeste (vestiaires) à la plus complexe (salle de spectacle), de la plus industrielle (les ateliers) à la plus spécifique (chapiteau). Elles sont généralement réalisées en lamellé-collé pour les grands bâtiments, en bois massif pour les plus petits, voire en bois de coffrage pour les galeries de liaison. De plus, divers équipements (pompes à chaleur, système de récupération des eaux de pluie, panneaux solaires) ont permis de doter le projet du label « Haute Qualité Environnementale ». Cette démarche n’a pas remis en cause le caractère modeste et économe du projet, dont les frais de construction se sont limités à 5 millions d’euros environ pour 5000 m² de locaux. La récupération a été le maître mot du projet, à l’image des tôles de bardage utilisées en façade de certains bâtiments et du chapiteau, issues d’un lot refusé par Eurodisney et ainsi récupéré à faible coût par les architectes. Les bâtiments de l’école de cirque sont au nombre de six, et s’articulent de façon aléatoire sur la parcelle afin de reconstituer l’image des cirques nomades. Le chapiteau, l’Altaïr (« cirque étoile »), peut recevoir 1600 spectateurs autour d’une piste traditionnelle de 13 mètres. Construit en forme d’étoile, entièrement en bois et en toile rouge, le chapiteau est visible depuis les alentours et tranche avec volumétrie simple des immeubles du quartier. Le bâtiment principal est composé de trois espaces distincts que sont le hall d’entrée pour l’accueil du public, les locaux de l’administration et les salles de cours, et le foyer, espace nu et modulable de 550m² qui peut accueillir des expositions, des conférences ou des réceptions. Pour les élèves, les architectes ont prévu un centre de préparation physique ainsi que des studios d’entraînement, installés dans des bâtiments industrialisés. Sept cabanes ont été construites derrière le chapiteau et le long des voies ferrées. Elles abritent de multiples fonctions liées à la réalisation des décors pour les spectacles et à la maintenance des bâtiments. La partie située au nord de la parcelle accueille aujourd’hui, dans un petit bâtiment en bois construit par l’équipe de l’Académie, un restaurant-cabaret, l’Amazir, ainsi que des roulottes qui permettent aux étudiants de première année de bénéficier d’un logement gratuit. La thématique durable du projet a été déclinée jusqu’au traitement paysager du site, qui se distingue par son approche botanique. Après les manifestations sportives de 1998, la ville de Saint-Denis avait bordé le terrain par des talus, le rendant ainsi inaccessible. Ceci a permis sa colonisation progressive par des plantes « rudérales », plus couramment appelées « mauvaises herbes ». Grâce au travail de la botaniste Liliana Motta, ces plantes ont pu être recensées et mises en valeur réhabilitant leurs anciens usages : médicinal, industriel ou même alimentaire. Les variétés de plantes ont donc été enrichies, chacune étant identifiée par une fiche d’information ethnobotanique permettant au visiteur de prendre connaissance de ce patrimoine végétal. L’autre aspect du projet paysager a été celui d’approfondir les fossés situés au milieu du site afin de faciliter l’infiltration des eaux de pluie. L’Académie Fratellini, qui s’affirme à la fois comme une véritable école de cirque (délivrance d’un CFA des arts du cirque par le Ministère de la Culture et le Ministère de l’Education Nationale), mais aussi comme une plateforme artistique de renommée internationale, trouve aujourd’hui une architecture à sa mesure. Atypique et hors normes, tant dans son esthétique, dans sa conception que dans la place laissée aux usagers (participation active au chantier, volonté d’inachèvement de certains espaces), elle fait figure de modèle en matière de développement durable. Ceci est le résultat d’une étroite collaboration entre les maîtres d’oeuvre et la maîtrise d’ouvrage conservée par Laurent Gachet, directeur de l’Académie Fratellini. Dans la lignée du Lieu Unique réalisé par les mêmes architectes à Nantes, l’Académie Fratellini s’affirme donc comme une proposition architecturale avant-gardiste en accord avec les préoccupations de notre siècle.(Texte rédigé par Gaelle Courcelle)
1 chapiteau de 1600 places, 6 ateliers des constructeurs (7 cabanes accolés), 1 centre de préparation physique, 2 studios pédagogiques pour les entraînements, 1 studio de danse et de jeu d’acteurs, 1 centre de préparation physique, 1 hall-foyer-administration, 1 Salle de spectacle de 250/400 places
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