Maison de Bonaré
Architecture du XXe de la Nièvre
Construite pour être la résidence secondaire d’un architecte francilien et de sa famille proche, la maison Bertrand est cependant conçue d’emblée comme pouvant devenir l’habitation principale du propriétaire. Champ d’expérimentation et de création, elle doit tout de même permettre un confort en toutes saisons. Parfaite illustration de l’architecture brutaliste, elle est une des rares représentations abouties en Bourgogne d’un courant qui, dans les années 1960-1970, est marqué notamment par l’emploi de matériaux laissés apparents, par la fragmentation et l’articulation des plans. La maison Bertrand affiche la dualité de son langage. Son architecture entretient un rapport particulier avec le paysage dont elle est, comme de nombreuses constructions morvandelles, indissociable. Elle oscille entre soumission au site et ostentation, entre respect de son environnement et expression, entre ouverture et repli sur elle-même.
Une architecture discrète….
Uniquement accessible depuis le hameau par un chemin de randonnée, la maison Bertrand est peu perceptible. A peine peut-on la soupçonner depuis un point de vue sur la vallée boisée culminant à 550 mètres : les Rochers de la Pérouse situés à 80 mètres au-dessus du niveau de l’habitation. L’architecte, sensible au côté sauvage de l’environnement, a volontairement choisi de fondre son oeuvre dans le paysage. Il a cherché à la faire disparaître le plus possible en l’enfonçant dans le sol. Utilisée en remblais, la terre extraite contribue à cacher la maison. La seule élévation visible est revêtue de pierres du pays dont l’appareillage imite celui des murets qui longent le sentier. La toiture est une terrasse engazonnée pensée comme le prolongement du jardin. L’été, elle devient un champ de fleurs et d’herbes hautes. Ainsi, depuis le chemin, seuls quelques indices nous renseignent sur une présence humaine. C’est le cas notamment des puits de lumière pyramidaux vitrés. Côté privé, l’habitation s’ouvre sur la nature : une véranda permet de profiter de la vue sur le jardin. Les escaliers extérieurs créent une promenade sur la maison. Le béton grise et tend lui aussi à prendre la couleur de la pierre locale.
….et pourtant expressive.
Le rapport au site, la rudesse et la force des paysages, les matériaux, appellent la comparaison avec les villas édifiées sur les côtes bretonnes à la fin des années 1960 et au début des années 1970 par des architectes sensibles au brutalisme comme Roger Le Flanchec. Outre le dialogue avec la pente (cependant semi-artificielle à Dun-les-Places), on observe des couvertures plates conçues comme des prolongements du sol et l’emploi conjugué de béton et de granit. Plus que des puits de lumière, les percements de toit sont de véritables cheminées et deviennent des sculptures géométriques qui s’élévent vers le ciel. Les plans sont découpés; les pièces sont soumises à des angles acérés. Sur trois niveaux et dans une forme proche du losange, le plan de la maison Bertrand est un assemblage de polygones irréguliers : remise triangulaire, chambre hexagonale… Les espaces s’organisent autour d’un patio central. La maison peut alors paraître tel un refuge, repliée sur elle-même. Le gradin des terrasses accentue la géométrie et le dynamisme du dessin. A l’exception des murs d’entrée, les élévations sont en béton brut de décoffrage. Conçus en même temps que le gros-œuvre, les aménagements intérieurs (cheminée, revêtements muraux en mosaïque) participent à la création d’un ensemble architectural homogène.
Extrait du Guide d’architecture en Bourgogne 1893-2007- Éditions Picard – 2008
Maison de Bonaré
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