Réhabilitation de la cité Salvador Allende

Avenue de la Division Leclerc, 93430 Villetaneuse

OBS-33
En 1966, le ministère de l’Education nationale et la Délégation générale du district de la Région Parisienne lançaient un concours d’idées à deux degrés pour « un aménagement de la plaine de Villetaneuse-Deuil-Montmagny comportant un ensemble universitaire ». À l’issue du jugement du deuxième degré, l’équipe Adrien Fainsilber – Hogna Sigurdardottir obtint le premier prix. Leur projet reposait sur l’idée de faire de l’université un élément fondamental et dynamique de la structure urbaine et non une entité refermée sur elle-même et isolée du reste de la ville. La réalisation retardée puis amputée d’une partie de son programme aura l’effet inverse. Réduit à une vingtaine d’hectares au centre de Villetaneuse, et formant une barrière entre le nord et le sud de la commune, le campus de la nouvelle Université Paris XIII, ne comprendra qu’un restaurant, une bibliothèque et un gymnase couvert. En terme de logements sera construite une cité HLM, la cité Salvador-Allende, destinée à accueillir également les personnels de l’université ainsi que des étudiants. Par ailleurs le désenclavement de la commune, située au nord ouest du département en lisière de Saint-Denis, par le RER et le prolongement de la ligne 13 du métro n’a pas été réalisé. La cité Allende conçue par A Fainsilber, malgré d’indéniables qualités architecturales a vite montré ses faiblesses. Composée de 14 bâtiments organisés autour de quatre cours fermées, elle offrait des logements en duplex ascendants ou descendants, desservis par un système de passerelles et de coursives (environ 3 km en tout) reliant tous les bâtiments. Ses façades de béton brut tournant le dos à la rue et à l’université ont tôt fait de lui donner l’image d’une forteresse isolée, impression renforcée par son implantation déconnectée de la trame urbaine. A cela se sont ajoutés une rapide dégradation du bâti et une insécurité grandissante. La réhabilitation de la cité a été évoquée dès le début des années 80, puis sa démolition totale. Mais il faudra attendre une vingtaine d’années et de nombreuses réunions de concertation avec les habitants, pour qu’une proposition intermédiaire soit adoptée : la restructuration et la réhabilitation de la cité, dé-densifiée, ouverte et intégrée au tissu urbain. Cette opération s’inscrivait dans le Grand projet de ville (GPV), et le contrat de ville intercommunal d’Epinay-Villetaneuse, qui prévoyait également l’extension de l’université, et le désenclavement de la ville avec la réouverture de la ligne de Grande ceinture (Tangentielle nord) et la création de la ligne de tramway Tram’y (prévue pour 2011 et qui reliera Saint-Denis- Porte de Paris – ligne 13 à la gare Villetaneuse-université et Epinay-sur-Seine). Dès 2001, débutaient les premiers relogements et en 2004 commençait enfin la restructuration de la Cité Allende : démolition de 5 des 14 barres et réhabilitation lourde en site habité de 283 logements. Deux axes ont été ouverts à cette occasion : la voie du tramway qui passe entre la cité et le campus et la rue du Centre qui la traverse et relie directement la gare et le centre-ville. La construction de bureaux, de commerces, d’activités et de logements étaient également prévus. Cette programmation incluait un concours pour la maîtrise d’oeuvre de la réhabilitation, gagné par les architectes Lipa et Serge Goldstein. Les deux frères, installés en Seine Saint-Denis, connaissaient bien le bâtiment de Fainsilber qu’ils appréciaient pour plusieurs raisons et notamment pour le caractère novateur des systèmes de circulation de la cité. Hélas ! ce type de liaison à l’intérieur d’espaces clos fonctionne mal sous certaines latitudes, et les 3 Kms de coursives et de passerelles desservant les logements étaient devenues sources d’angoisses pour les habitants et voies royales d’esquive pour les délinquants avertis. De fait, un des impératifs du projet était la suppression des coursives et la reconfiguration de la cité en bâtiments autonomes avec chacun son escalier, son ascenseur (existant ou créé) et son hall sécurisé. Dorénavant les circulations sont uniquement verticales. Les bâtiments sont distribués autour de cours-jardins, ouvertes sur la rue du Centre, tracée à l’emplacement des barres détruites et nouvel axe de la cité. Cependant ces cours-jardins demeurent des espaces collectifs privés et sont donc clos de grilles, hautes de 4 mètres, mais assurant une transparence sur la rue. Un traitement paysager soigné les agrémente. Les allées, dessinées selon un tracé géométrique, desservent les halls d’entrée ainsi que les espaces de détente ou de jeux (5 ont été créés). La rigueur de cette composition est adoucie par la variété des essences plantées et l’aléatoire des arbres conservés. Les logements à rez-de-chaussée ont fait l’objet d’une attention particulière. La fermeture des coursives a permis de les convertir en espaces privatifs. Ils sont séparés des parties collectives (cours-jardins) par des clôtures en caillebotis. Ce même dispositif, mais cette fois ouvrant a permis de sécuriser les logements du rez-de-chaussée en leur offrant un prolongement extérieur. L’ensemble constitue un socle unificateur aux différentes façades. De même la récupération des passages intérieurs a permis l’agrandissement de certains logements. Dans les étages, les appartements ont été mis en conformité électrique, les appareils sanitaires ont été changés, les fenêtres bois déposées ont été remplacées par des modèles double vitrage en PVC. La distribution des logements tous en duplex, n’a pas été modifiée. L’isolation thermique par l’extérieur a été réalisée au droit des logements. Le travail sur les façades a demandé une intervention plus visible de la part de Lipa et Serge Goldstein, soucieux de respecter le travail d’un confrère mais confrontés à la nécessité de « ranimer » des murs en béton gris uniforme et présentant deux types de composition pour décrire le recto et le verso des 442 logements. Ils ont revêtu les façades d’un bardage en tôle d’aluminium perforée et en jouant sur la bichromie, le gris et le rouge. Ils ont ainsi proposé une lecture à la fois claire et dynamique des différents blocs. Pour les façades surplombant les cours et dotées de balcons, ils ont misé sur un rythme vertical en revêtant les surfaces aveugles des sanitaires de tôle ondulée rouge. Tandis que pour les façades tournées vers l’extérieur de l’opération, ils ont décomposé les bâtiments en trois bandes horizontales, signalant ainsi la présence des duplex. Les escaliers, hors oeuvre, sont habillés de jouées pare flamme, habillées de rayures verticales noires et blanches, à la fois pour prévenir les incendies mais aussi préserver l’intimité des appartements. Ce jeu des couleurs, en contrepoint de celui des pleins et des vides, allège les volumes et gomme l’austérité des anciennes façades. La qualité de cette nouvelle peau de métal apporte un standing à ces immeubles qui correspond bien aux convictions des architectes pour qui un programme social mérite beaucoup d’attention. Le travail sur les clôtures, traitées comme des morceaux d’architecture à part entière, complète en finesse cette opération de réhabilitation menée avec autant de respect pour l’architecture originelle que pour le confort et la sécurité des habitants.

Programme

Destruction partielle d’une opération de logements construite par l’architecte Adrien Fainsilber en 1970-72 et réhabilitation de 274 logements.

Maître(s) d'ouvrage(s)
Types de réalisation
Année de réalisation
2007
Surface(s)
25 631 m² (SHON)
Coûts
12 000 000 € HT
Crédit photos
LUCAS S.
Réalisation mise à jour
septembre 2022
debug, no arrray